Par Benjamin Soro
Abidjan, 08 juil 2024 (AIP)- Le Président du conseil d’administration (PCA) de la Confédération des acteurs de la filière bétail-viande en Côte d’Ivoire (CAFIBELCI), le Général Soumahoro Gaoussou dans une interview à l’AIP formule des propositions pour une assemblée générale pacifique, caractérisée par la transparence et l’engagement citoyen de tous les acteurs de la filière bétail-viande en Côte d’Ivoire pour la mise en œuvre de l’interprofession.
Il est de plus en plus question d’une assemblée générale constitutive de l’interprofession de la filière bétail-viande. Quelle est la situation en prélude à cette assemblée générale ?
En effet, l’organisation de l’assemblée générale constitutive de l’interprofession de la filière bétail-viande est en cours. À cet égard, nous avons récemment tenu un atelier de renforcement des capacités pour la mise en place de l’interprofession, ainsi qu’un autre pour l’adoption de l’avant-projet des statuts et règlements. C’est à ce stade que des problèmes sont survenus.
En effet, les statuts prévoient la création de collèges, notamment ceux des producteurs (éleveurs), des commerçants et des transformateurs. Normalement, ce sont les acteurs eux-mêmes qui doivent mettre en place leur collège lors des assemblées générales constitutives. Cependant, des collèges et des délégués nous sont imposés de manière arbitraire, comme s’ils considéraient les acteurs comme de simples exécutants. Pourtant, on nous rappelle constamment que cette initiative concerne exclusivement les acteurs.
Avez-vous des reproches à formuler à l’encontre de certaines personnes impliquées dans la conception et la mise en œuvre de cette interprofession ?
Je n’ai pas de reproches personnels à adresser à quelqu’un, mais je suis préoccupé par les agissements d’un lobby présent dans ce processus. L’interprofession devrait être dirigée par les acteurs eux-mêmes, mais étrangement, des représentants du ministère s’imposent et agissent comme juge et partie. S’ils sont déterminés à confier la gestion de la filière à M. Issaka Sawadogo, c’est leur choix, mais il est crucial de ne pas permettre à ces représentants d’utiliser les ressources de l’État pour compromettre un secteur aux multiples défis.
Pourquoi avez-vous laissé ce processus se poursuivre jusqu’à présent ?
Je crois en nos institutions nationales et je leur accorde mon respect. Cependant, dès que j’ai discerné des signes de compromission, j’ai adressé plusieurs courriers pour obtenir des clarifications sur les critères de sélection des membres du comité ad hoc, ainsi que sur les résultats des travaux de ce comité ayant formé les différents collèges et désigné les délégués. Ce comité ad hoc a été institué de manière autoritaire, avec à sa tête un fonctionnaire d’État. De plus, j’ai cherché à comprendre les critères ayant servi à attribuer un nombre de délégués à chaque organisation. Malheureusement, comme à leur habitude, ils ont ignoré toutes nos correspondances.
Vous avez dénoncé dans une lettre adressée au ministre des Ressources animales et halieutiques les “méthodes dégradantes d’un lobby”. À quel lobby faites-vous référence et quelles sont ces méthodes dégradantes ?
Par définition, un lobby est un groupe de pression, je préfère ne pas nommer d’organisations spécifiques dans les médias. Cependant, je souligne le fait qu’un comité ad hoc a présidé pendant près de deux ans sans fournir au conseil ad hoc, nommé par arrêté ministériel, les conclusions de ses travaux. Nos tentatives pour obtenir des réponses concernant des questions suspectes sont systématiquement ignorées. De plus, un mémorandum a été élaboré stipulant qu’en cas de désaccord entre les acteurs, un nouveau comité serait instauré pour organiser l’interprofession. Il est possible que le ministre ne reçoive pas mes courriers, car M. Sawadogo a déclaré lors de nos réunions qu’il recevait toutes nos correspondances sans jamais y répondre. Est-il possible que nos lettres soient interceptées ? Si tel est le cas, je demanderais au ministre de me recevoir personnellement pour exposer en détail nos préoccupations.
Quelles solutions proposez-vous pour rassembler tous les acteurs de la filière bétail ?
Je propose que l’administration laisse les acteurs organiser librement l’interprofession conformément à la réglementation en vigueur. Les assemblées générales sont souveraines et la gestion de l’interprofession doit rester entre les mains des acteurs. Certaines interprofessions se sont mises en place rapidement dans le passé. Le taux élevé d’analphabétisme au sein de la filière bétail-viande rend cette manipulation trop facile, favorisant ainsi l’influence du lobby.
Êtes-vous soutenu par d’autres acteurs dans cette lutte ?
Bien sûr, nous sommes trois membres du comité à partager cette position.
Quel appel lancez-vous aux acteurs de la filière bétail ?
Je les appelle à rester mobilisés pour protéger nos activités et favoriser le développement de cette filière, crucial pour la souveraineté alimentaire de la Côte d’Ivoire.
Quelles mesures proposez-vous pour dynamiser la filière bétail en Côte d’Ivoire et atteindre l’autosuffisance en viande ?
Nous devons prioriser le développement de la production nationale, conformément à la PONADEPA (Politique nationale pour le développement de l’élevage, de la pêche et de l’aquaculture), en apportant un soutien effectif aux acteurs locaux. Il est temps de mettre fin à la dépendance aux importations.
Encadré
Dans la mise en œuvre de la PONADEPA, le ministère des Ressources animales et halieutiques travaille à structurer les différentes filières en créant des organisations interprofessionnelles agricoles. Si cinq interprofessions ont été constituées portant respectivement sur les filières avicole, porcine, lait, pêche et aquaculture, la filière bétail viande est confrontée à des conflits entre les acteurs.
Suite à l’interview du PCA de la CAFIBELCI, l’AIP a joint les autorités compétentes du ministère, afin de recueillir leur version. ”L’assemblée générale pour l’interprofession de la filière bétail-viande aura lieu en fin de semaine” a rassuré Annie Anzouan du service communication du ministère des Ressources animales et halieutiques, lundi 08 juillet 2024.
(AIP)
bsp/fmo