Agboville, 12 oct 2023 (AIP) – A Agboville, on peut se remémorer l’existence des colons français, à travers des anciennes bâtisses dont l’architecture particulière capte l’attention. « Quand je suis arrivée à Agboville pour la première fois, en parcourant certaines rues je me suis dit: mais c’est une vielle ville ! », lance dame Guéi Albertine, stupéfaite à la découverte de la capitale de la région de l’Agnéby-Tiassa (Sud ivoirien).
Majoritairement concentrées au quartier Commerce, des anciennes maisons cohabitent avec les constructions modernes. Elles servent d’habitation, de locaux de services administratifs comme la sous-préfecture, la justice, le tribunal, la maison d’arrêt et de correction d’Agboville (MACA), les directions régionales des Eaux et Forêts, de l’Education nationale, de la Culture… Ces bâtisses, ce sont des maisons coloniales. Elles servaient autrefois d’habitations, de comptoirs, de magasins de commerce des blancs.
Ces maisons où cohabitent un mélange d’ancien et du neuf
Ces maisons évoquent une époque révolue. Les signes de vétusté sont visibles dès le premier regard, leur donnant un caractère unique et nostalgique. La toiture est parfois atteinte de rouille ou refaite lors des travaux de réhabilitation. Leurs grands murs présentent quelques fois des signes de dégradation avec des taches d’humidité et de moisissure, signes des infiltrations d’eau. La réhabilitation à l’intérieur est un témoignage de l’attention portée à la préservation de son histoire tout en lui insufflant une nouvelle vie.
L’ensemble de la façade de ces bâtiments construits par les colons français dégage une impression de durabilité, d’histoire et d’élégance propre à l’architecture de l’époque. Cette présentation extérieure est un rappel visuel du passé, préservant une part de l’héritage architectural de la ville d’Agboville. Les maisons coloniales sont désormais un mélange harmonieux de l’ancien et du neuf.
La sous-préfecture qui se dresse fièrement à la croisée de deux voies, fut le bureau du commandant de Cercle à l’époque coloniale. A l’intérieur de ce bâtiment R+1, on aperçoit les marques de l’ancienneté malgré les aménagements qui ont été faits. Non loin de là, le bâtiment de la CFAO (Compagnie française de l’Afrique occidentale) qui était le comptoir des colons.
En plus de ces maisons, il y a une école centenaire. La toute première de la ville, l’actuel Ecole primaire publique (EPP) Plateau I, où les colons ont formé des premiers cadres de la Côte d’Ivoire comme Ernest Boka, le premier ministre de l’Education nationale. D’éminentes personnalités du pays ont aussi fréquenté dans cette école telles que l’ex-président de la République, Laurent Gbagbo, l’ex-ministre Emile Constant Bombet, l’actuel président de l’Assemblée nationale, Adama Bictogo et plusieurs cadres d’Agboville comme Niangoran Eyemon, Affoumou Yapo.
Construite en 1922, cette école a ouvert ses portes en 1923. Sa toiture en tuile a été changée mais son apparence rime avec vétusté et ruine où 160 élèves occupent les anciennes places de ces personnalités. Des anciens élèves dont certains viennent de l’Europe, ne manquent de venir se recueillir dans leur école.
Une fierté pour des usagers de ces bâtisses coloniales
« L’histoire fait d’Agboville une ville prospère. Pour moi, c’est une fierté d’entendre parler de ces maisons et de les voir. Elles nous donnent de la mémoire et nous disent que nous sommes toujours avec les blancs. Agboville est une ville historique. Le peuple Abbey est dans l’histoire », relève N’cho Achille, originaire du département.
Comme lui, des fonctionnaires ne cachent pas leur joie de travailler dans un bâtiment colonial. Directeur de l’EPP Plateau I depuis 2020, Tano Aka Emmanuel chérissait cette envie d’exercer dans cet établissement « prestigieux » de par la qualité des personnalités qu’elle a formé.
« Ça été une grande joie pour moi lorsque j’ai reçu la nouvelle de ma mutation ici parce j’avais appris que l’ex-président, Laurent Gbagbo avait fréquenté dans cette école et qu’il y était venu quand il était président. J’avais envie de diriger cette école un jour. Je suis vraiment heureux d’être ici », révèle M. Tano, admirant l’un des vieux bâtiments.
Pour Edé Ablé, un leader de jeunesse, ces maisons coloniales donnent de la nostalgie, rappellent la traite négrière et la souffrance endurée par ses aïeuls. Par contre, il se réjouit des fruits de cette colonisation tel que l’éducation qui est la base de tout développement.
(Reportage réalisé par Esther Yao)
(AIP)
ena/cmas